Alors que les négociations de paix pour un accord de cessez-le-feu national seraient, aux dires du gouvernement birman, en train d’aboutir, l’armée birmane continue d’attaquer certains groupes armés ethniques dans les zones Kachin, Shan, Palaung et Karen. Ces affrontements sèment le doute quant à la possibilité d’une signature rapide de l’accord de cessez-le-feu. En attendant, ce sont, comme souvent, les civils et les communautés locales qui paient le prix de la guerre. La protection des communautés locales, est en effet, largement absente des discussions de paix.
Une rencontre est prévue entre les représentants de cinq des plus importants groupes armés ethniques, le Président et le chef des armées birmanes, au mois de septembre, à Nay Pyi Daw. Le gouvernement, très confiant, souhaite qu’à l’issue de ces échanges, une date soit fixée pour concrétiser la signature de l’accord de cessez-le-feu national. Pourtant cet optimisme semble prématuré puisque l’un des obstacles majeurs à la signature de l’accord n’a toujours pas été résolu. En effet, le gouvernement refuse d’inclure six groupes armés ethniques au processus de paix alors que les autres organisations armées ethniques ont conditionné leur signature à une inclusion de tous les groupes armés, sans exception. La stratégie « diviser pour mieux régner » du gouvernement, lui a permis de convaincre une partie des groupes armés ethniques qu’un accord non inclusif mais avec des garanties pour ces six groupes serait un bon compromis. Les autres sont toujours catégoriques et refusent de signer l’accord tant que le processus ne sera pas totalement inclusif. Cette question sera de nouveau abordée lors de la rencontre.
Le président des représentants des groupes armés ethniques (Senior Delegation), a déclaré au sujet des groupes armés ethniques exclus « si le gouvernement et l’armée birmane ne veulent pas qu’ils participent, ou si l’armée continue de les attaquer, la signature d’un cessez le feu national n’aura aucun sens. ». Aung San Suu Kyi s’est également exprimée sur le sujet « Nous espérons qu’il (l’accord de cessez-le-feu national) aboutisse bientôt, nous souhaitons qu’il soit totalement inclusif et nous voulons un traité ou chaque partie aient des responsabilités pour que notre pays puisse avancer vers la paix ».
Outre le désaccord sur le caractère inclusif du processus, la persistance des affrontements armés sur le terrain, constitue un autre frein à la signature de l’accord. Des rapports indiquent que des combats ont eu lieu la semaine dernière entre l’armée birmane et l’armée Kachin (KIA), l’armée Shan du Sud (RCSS), l’armée Ta’ang (TNLA), et l’une des armées Karens. Tandis que le Chef des armées annonçait devant le Parlement que les affrontements avaient réduit ces dernières années, les soldats menaçaient les communautés Palaung sur le terrain en déclarant qu’ils allaient « détruire la TNLA, comme il l’ont fait avec l’armée Kokang ». Les communautés locales sont les premières victimes des affrontements armés. Elles sont souvent détenues arbitrairement par l’armée birmane, torturées, forcées à travailler pour les militaires, accusées de travailler pour les armées rebelles, ou même tuées.
Ces violations des droits de l’homme commises par les forces armées birmanes, sont régulièrement documentées par les groupes de défense des droits de l’homme locaux et internationaux et continuent de l’être malgré les négociations de paix en cours. Le comportement de l’armée birmane n’a tout simplement pas changé malgré ses engagements et ses déclarations optimistes. La signature du cessez-le-feu, quand elle aura lieu, sera saluée par la communauté internationale qui ne manquera pas de féliciter chaleureusement le gouvernement birman et le Chef des armées. Et pourtant si le gouvernement et l’armée birmane continuent d’ignorer leurs obligations de ne pas commettre d’abus sur les civils dans les zones de conflits armés, l’accord de cessez-le-feu sera dénué de sens et de légitimité.
Plutôt que de pousser les groupes armés ethniques à signer l’accord de cessez-le-feu, la communauté internationale devrait faire davantage pression sur la Birmanie pour qu’elle remplisse ses obligations internationales et cesse de s’en prendre aux communautés ethniques. Tant que l’armée birmane bénéficiera de cette totale impunité, les violations des droits de l’homme continueront et la paix et la réconciliation nationale ne seront pas envisageables.