Info Birmanie a reçu des informations très préoccupantes de la part d’organisations partenaires en Birmanie. À Letpandan, dans la division de Pegu, plus de 300 forces de sécurité sont postées, depuis le 2 mars, à l’entrée d’un monastère où sont logés 150 leaders étudiants qui protestent pour l’amendement du projet de loi sur l’éducation.
Les étudiants avaient décidés malgré l’échec des négociations avec les autorités locales, de reprendre leur marche mais les forces de sécurité les en empêchaient. D’autres étudiants semblent également se préparer à rejoindre les différentes marches du pays. La montée des tensions des derniers mois et l’importance du déploiement policier inquiètent les organisations de la société civile locale qui craignent une répression brutale dans la mesure où les forces de sécurité sont deux fois plus nombreuses que les manifestants.
Info Birmanie a rencontré les leaders étudiants lors de sa dernière mission en Birmanie en février 2015 et s’inquiète de la tournure que pourrait prendre les événements. Les protestations étudiantes sont un symbole fort dans l’histoire birmane et sont toujours perçues comme une menace pour la stabilité du régime. Nous appelons le gouvernement français à réagir rapidement pour faire pression sur le gouvernement birman pour que ses forces de sécurité n’aient pas recours à la violence et que les marches étudiantes puissent continuer sans que les leaders des manifestations ne soient inquiétés.
Pourquoi les étudiants manifestent-ils et comment la situation en est-elle arrivé à ce niveau de tension?
En novembre dernier les étudiants birmans ont lancé un ultimatum au gouvernement pour organiser des négociations quadripartites (entre les leaders étudiants, les représentants du Réseau National pour les Rofrmes de l’Education (NNER), le Gouvernement et le Parlement) afin de négocier l’amendement du projet de loi sur l’éducation. Le 20 janvier, sans réponse officielle du gouvernement dans le délai imparti, des centaines d’étudiants ont entamé des marches pacifiques à travers le pays pour réclamer la tenue de ces négociations.
Les étudiants dénonçaient l’absence de protection des syndicats étudiants, le manque d’indépendance des institutions éducatives et les lacunes de l’enseignement en langue ethnique.
Le 27 janvier, le groupe d’étudiants venant de Mandalay s’est heurté à près de 100 policiers leur barrant l’entrée de la ville de Thaunghta, dans la division de Mandalay, laissant craindre de possibles affrontements. Après de brèves négociations entre les étudiants et les autorités locales, les policiers ont finalement levé leur barrage, et le lendemain, les officiels du régime ont rencontré les représentants étudiants à Naypyidaw. Les négociations ont eu lieu le 1er et le 2 février, mais le 3 février, le gouvernement birman a suspendu les discussions jusqu’au 12 février, sans qu’aucun accord n’ait été trouvé.
Le 14 février, les représentants étudiants, le NNER le Gouvernement et le Parlement sont finalement parvenus à un accord incluant les 11 demandes clés des étudiants. Le Ministère de l’Education s’engageait ainsi à retirer son projet de loi et à soumettre le nouvel accord obtenu au Parlement.
Suite à ces discussions, les étudiants ont décidés d’interrompre leur marche le temps des démarches législatives, à condition qu’elles aboutissent à un résultat concret avant la fin du mois de février.
Toutefois le 17 février, un média dirigé par l’Etat, a publié le nouveau projet de loi du Ministère, rendant la situation à nouveau explosive. En effet ce nouveau texte, qui s’avère extrêmement proche du projet de loi initial, s’accompagnait de l’accord du 14 février mais semblait préciser que celui-ci ne constituait que des recommandations issues des ONGs, des représentants étudiants et du NNER.
Alors que depuis plus de 3 mois les tensions sont vives autour de ce projet de loi sur l’éducation, le gouvernement semble être revenu sur ses engagements et continue d’harceler et de menacer les leaders des protestations.
A la fin du mois de février, les étudiants ont repris leur marche de protestation dans l’ensemble du pays et la montée des tensions laissent craindre le pire.
Depuis le 2 mars, à Letpandan, dans la division de Pegu, plus de 300 forces de sécurité sont postées à l’entrée d’un monastère où sont logés 150 leaders étudiants qui protestent par une grève de la faim pour l’amendement du projet de loi sur l’éducation. Des points de contrôle ont été mis en place pour surveiller et restreindre les déplacements des voyageurs dans la région. Les personnes soutenant ces actions et d’autres étudiants se sont vus interdire l’accès à Latpadan. Les autorités ont coupé l’approvisionnement en essence pour les générateurs de tous les camps de sit-in, et limitent l’accès à l’eau et à la nourriture des sympathisants. Plusieurs étudiants ont perdu connaissance suite aux privations.
D’autres étudiants semblent également se préparer à rejoindre les différentes marches du pays. Tandis que d’autres prévoient de former un organisme de surveillance pour observer le processus d’amendement de la loi sur l’éducation.
Des manifestations de solidarité ont été organisées par des étudiants et la société civile à Pakokku, Mandalay. Ils condamnaient le nombre excessif des forces de l’ordre.
La montée des tensions des derniers mois et l’importance du déploiement policier inquiètent les organisations de la société civile locale qui craignent une répression brutale dans la mesure où les forces de sécurité sont beaucoup plus nombreuses que les manifestants.
Le 6 mars à Rangoun, une manifestation devant la mairie a deja été réprimée : arrestation d’une vingtaine d’étudiants et violences policières.
La communauté internationale doit faire pression sur le gouvernement birman pour qu’il respecte ses engagements et ne reproduise pas ses vieilles habitudes en matière de répression des manifestations étudiantes…