Le trafic d’êtres humains reste l’un des principaux fléaux en Birmanie, malgré les efforts du nouveau gouvernement pour endiguer le travail forcé et l’enrôlement des enfants dans l’armée. Dans leur rapport annuel sur le trafic humain (« 2016 Trafficking in Persons (TIP) Report »), les États-Unis ont placé la Birmanie comme l’un des pires pays en termes de trafic humain, aux côtés de l’Ouzbékistan, du Soudan et d’Haïti.
La dégradation de la position birmane par les États-Unis est un signe envoyé au nouveau gouvernement élu et à l’armée birmane toujours puissante, pour les inciter à prendre en main le problème de l’utilisation d’enfants-soldats et du travail forcé. Cette action met également en avant la préoccupation des États-Unis vis-à-vis des persécutions dont sont victimes les Rohingyas à l’Ouest du pays.
Aung San Suu Kyi, ministre des affaires étrangères de Birmanie, a qualifié cette décision de « regrettable », déclarant que cette dernière « pourrait entraver la coopération entre la Birmanie et les États-Unis ».
Le nouveau rang auquel a été rétrogradé la Birmanie, faute d’améliorations de son bilan durant les quatre dernières années où elle se situait à un rang supérieur, pourrait être utilisé par la communauté internationale pour lui imposer de nouvelles sanctions.
Le changement s’est produit moins d’une semaine après qu’Aung San Suu Kyi ai conclu sa visite en Thaïlande, durant laquelle elle a fortement insisté sur l’amélioration du statut des millions de travailleurs birmans sur place. Un communiqué du gouvernement avait fait état des efforts mis en œuvre pour arrêter le travail forcé et prévenir le recrutement en-dessous de l’âge légal au sein de l’armée.
Concernant les « nombreux migrants illégaux se noyant chaque jour dans l’Océan Indien » – une référence claire aux Rohingyas fuyant les violences sectaires en Arakan – le communiqué a prudemment décliné toute responsabilité du gouvernement dans ces incidents, soulignant simplement que la seule responsabilité des autorités birmanes est d’organiser des voyages retour « sécuritaires » vers le pays d’origine des migrants; soulevant que pour la plupart d’entre eux « il était prouvé qu’ils n’étaient pas originaires du Myanmar. »
« La dégradation de la position de la Birmanie arrive un peu tard. La junte militaire ayant été longtemps l’un des pires trafiquants d’êtres humains d’Asie du sud-est », a expliqué Matthew Smith, responsable de Fortify Rights. « L’armée birmane est une institution non réformée, continuant à utiliser le travail forcé en toute impunité, et doit faire davantage pour que cela cesse. »
En 2015, l’armée birmane, les gardes-frontières et les groupes ethniques armés ont encore utilisé le travail forcé. Par exemple, Fortify Rights a dévoilé la manière dont l’armée birmane a contraint, par la menace, des personnes d’origine arakanaise à transporter des armes et des vivres dans la zone de conflit de l’état d’Arakan, et de creuser des tombes pour les soldats tués au combat, en décembre 2015 et janvier 2016.
Fortify Rights a aussi démontré comment les mafias transnationales ont, avec la complicité des autorités, exploité des dizaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants Rohingyas, en 2015.
« La plupart des gouvernements prennent au sérieux le Trafficking in Persons (TIP) Report […] Nous espérons que le rapport de cette année servira de catalyseur à des actions positives de la part de tous les gouvernements, y compris les États-Unis. »