Justice for Myanmar révèle l’existence d’un réseau mondial permettant à l’armée birmane d’utiliser des avions ATR

Justice for Myanmar révèle l’existence d’un réseau mondial permettant à l’armée birmane d’utiliser des avions ATR

Une nouvelle enquête révèle l’existence d’entreprises soutenant l’armée de l’air birmane, qui commet des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité en toute impunité.

Traduction française par Info Birmanie, du communiqué de presse de Justice For Myanmar du 29 août 2024 : « Justice for Myanmar reveals global network enabling Myanmar military’s use of ATR aircraft »

Justice For Myanmar a mis au jour un réseau mondial d’entreprises qui ont permis à l’armée birmane d’acquérir et d’exploiter au moins dix Avions de Transport Régional (ATR) de fabrication française à partir de 2013.

L’armée a utilisé ces appareils pour transporter des troupes et des armes utilisées pour commettre des crimes internationaux, ainsi que pour la surveillance et la reconnaissance.

L’enquête révèle que des sociétés internationales, des courtiers en armes militaires privés et des compagnies aériennes commerciales ont transféré des avions ATR à l’armée, en dissimulant dans certains cas l’utilisateur final, dans une tentative apparente d’échapper aux sanctions.

Des entreprises birmanes et des entreprises internationales ont également aidé l’armée en achetant des pièces détachées et en fournissant des services de maintenance.

Des entreprises établies dans l’Union Européenne – notamment ATR et Sabena Technics en France et Axis Flight Simulation Systems en Autriche – ont permis la poursuite des opérations de vol des avions ATR de l’armée en assurant la réparation des principaux composants, en fournissant des pièces de rechange et des éléments clés, et en permettant la formation des pilotes de l’armée de l’air birmane au pilotage d’avions ATR.

Ces activités ont eu lieu malgré les mesures restrictives de l’UE à l’égard du Myanmar en vigueur au cours de la période examinée et renforcées en 2018.

Des entreprises de Singapour ont permis la poursuite des opérations aériennes des avions ATR au Myanmar en fournissant des pièces de rechange essentielles, y compris après la tentative de coup d’État de l’armée.

Air KBZ – rebaptisée Mingalar Aviation, détenue par le groupe de crony 24 Hour, a joué un rôle central en transférant deux avions ATR à l’armée de l’air et en permettant au courtier en armes International Gateways Group d’utiliser son nom pour acheter deux autres ATR à Vietnam Airlines avant le coup d’État.

Air KBZ a également loué au moins deux ATR à l’armée pour un usage commercial, lui procurant une source de revenus.

Le conglomérat de crony KT Group, lié à l’armée, a négocié l’acquisition de deux avions ATR pour l’armée, par l’intermédiaire de sa filiale MWG Limited, établie dans les îles Vierges britanniques.

D’autres avions ATR ont été fournis par le conglomérat de crony Htoo Group, qui a en outre assuré la maintenance d’au moins six des ATR de l’armée de l’air.

Justice For Myanmar demande aux gouvernements d’empêcher d’urgence l’armée de l’air birmane et ses courtiers d’accéder aux pièces détachées et de remplacement, de recevoir une formation pour le personnel navigant et la maintenance et d’accéder aux instructions nécessaires au maintien en service de ses avions ATR.

Des sanctions ciblées et coordonnées devraient être étendues à toutes les entreprises birmanes qui soutiennent la flotte d’ATR de l’armée, notamment le 24 Hour Group, le KT Group, l’International Gateways Group et le Htoo Group.

Les mesures existantes doivent être appliquées aux violations directes et indirectes passées et présentes.

Les entreprises internationales doivent cesser toute activité avec les négociants en armes et les compagnies aériennes civiles birmanes qui soutiennent la junte.

Yadanar Maung, porte-parole de Justice For Myanmar, déclare :

« Il est inacceptable que l’armée birmane ait pu acquérir des avions ATR, des pièces détachées et des services de maintenance pendant de nombreuses années alors qu’elle commettait un génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité en toute impunité.

« La junte utilise maintenant ces avions pour transporter ses troupes et ses armes dans le cadre de sa campagne de terreur à l’échelle nationale, soutenant des attaques indiscriminées contre les civils qui s’apparentent à des crimes de guerre.

« ATR et d’autres entreprises internationales ont manqué à leurs responsabilités en matière de droits humains en ne faisant pas preuve de la diligence requise pour empêcher l’utilisation de leurs produits par l’armée birmane.

«  Les gouvernements doivent prendre des mesures urgentes pour que l’armée de l’air birmane ne puisse plus utiliser les – au minimum – dix avions ATR sur lesquels elle s’appuie pour mener ses attaques brutales contre des enfants, des écoles, des cliniques et des communautés entières.

« Cela doit impliquer de couper l’accès de l’armée aux pièces détachées, à la formation et à l’assistance technique pour ses avions ATR.

« L’utilisation d’avions français par l’armée birmane pour commettre des crimes internationaux montre également que l’Union européenne doit étendre et mieux appliquer ses mesures restrictives à l’égard du Myanmar.

« Singapour doit également faire davantage pour empêcher l’armée d’accéder aux biens et aux technologies à double usage et pour cesser d’autoriser les courtiers en armes de l’armée birmane d’opérer sur son territoire.


Yadanar Maung, porte-parole de Justice For Myanmar

Pour lire le communiqué d’origine en anglais cliquez ICI

Pour lire le rapport complet de Justice for Myanmar en anglais cliquez ICI

Qu’es qu’un Crony ?

Le mot « crony ou cronies » est tiré de l’expression anglaise « crony capitalism » qui pourrait être traduite comme  « capitalisme de connivence ». En Birmanie, on parle de cronies lorsqu’on désigne les magnats de la finance et de secteurs clés de l’économie birmane entretenant des relations de copinage avec les hauts gradés de la junte militaire. Ils sont essentiels à l’existence la junte birmane qui s’est infiltrée, à la manière d’un cartel, dans de nombreux pans de l’économie birmane, lui offrant ressource et pouvoir.