Exode des rohingyas : la France doit faire pression sur les autorités birmanes

Exode des rohingyas : la France doit faire pression sur les autorités birmanes

Info Birmanie est très préoccupée par la crise humanitaire qui se déroule dans le détroit de Malacca et la mer d’Andaman. Selon l’Organisation internationale pour les migrations, plusieurs milliers de migrants se trouveraient, depuis plusieurs semaines, sur des embarcations de fortune, en pleine mer. Ces réfugiés de Birmanie et du Bangladesh, dont la plupart sont issus de la minorité musulmane rohingya, cherchent à fuir les persécutions dont ils sont victimes dans leur pays depuis de nombreuses années.

Plusieurs États ont haussé le ton contre la Birmanie dont les politiques discriminatoires conduisent ces migrants à fuir, mais aussi contre la Malaisie, la Thaïlande et l’Indonésie qui ont refoulé ces bateaux vers la mer, condamnant leurs occupants à une mort certaine. La France, pays des Droits de l’Homme, est restée silencieuse.

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Face aux pressions internationales la Malaisie et l’Indonésie se sont finalement engagées à ne plus refouler les bateaux en mer, à porter secours aux migrants en détresse et à les accueillir temporairement sur leur territoire. Info Birmanie salue ces annonces.

Cependant aucune mesure n’est prise pour résoudre le fond du problème et l’origine de l’exode massif de ces réfugiés. La crise humanitaire que vivent les rohingyas dure depuis des années et ne prendra pas fin tant que le gouvernement birman mènera une politique de discrimination et de répression contre la minorité musulmane.

Cette crise humanitaire effroyable était en effet prévisible. Depuis des décennies, les rohingyas ont été systématiquement privés de citoyenneté et soumis à des politiques discriminatoires et répressives par le gouvernement. Le regain des tensions en 2012 a fait plus de 200 morts et conduit 140 000 personnes à fuir leurs maisons et villages. Les autorités birmanes sont complices de ces violences et ont manifesté un manque flagrant de volonté de respecter et protéger cette minorité musulmane. Elles leur ont imposé des restrictions religieuses et familiales et ont renié leurs libertés fondamentales. Les rohingyas ne peuvent pas se déplacer librement et leur accès à l’éducation, la santé et l’emploi est limité.

Aujourd’hui, ils sont prêts à risquer leur vie pour échapper à ces conditions de vie. Ils n’ont d’autre choix que de quitter leur pays par la mer, et se retrouvent ainsi embarqués sur des bateaux, livrés aux mains de passeurs peu scrupuleux. Chaque année, cet exode est particulièrement important avant la saison des pluies, période où les conditions de vie s’aggravent encore dans les camps de déplacés et pendant laquelle la mer est plus calme.

Cette année, les discriminations s’étant encore accrue contre les rohingyas en Birmanie, leur exode a été 30% plus important qu’à la même période en 2014. De plus, le 1er mai, au moins 30 corps, présumés rohingyas, ont été découverts dans un camp près de la frontière entre la Thaïlande et la Malaisie. Détenus par les passeurs, ils seraient morts de faim et de maladies car leur famille ne pouvait pas payer les rançons exigées pour leur traversée. Suite à cette découverte macabre, les autorités thaïlandaises ont mis en place des politiques répressives pour lutter contre le trafic d’êtres humains dans la région. Elles ont désorganisé les filières clandestines : les passeurs, qui avaient l’habitude de passer par la Thaïlande et qui s’en sont trouvés empêchés, ont alors abandonné les bateaux en mer, laissant ces personnes dériver sans eau potable, médicaments ni nourriture.

Depuis des années, les migrants birmans et bangladais sont considérés comme des parias qu’aucun pays ne souhaite accueillir. Leurs embarcations sont régulièrement refoulées par les pays de la région sans que la communauté internationale ne s’en préoccupe. La crise actuelle met seulement en lumière une situation catastrophique qui ne peut plus durer.

A l’initiative de la Thaïlande, une réunion régionale sera organisée le 29 mai pour évoquer le problème de la migration clandestine et le sort à réserver aux migrants interpellés : amende, prison et rapatriement. Fidèle à ses politiques répressives, la Birmanie a annoncé qu’elle pourrait la boycotter.

Le 11 mai, la NLD, le parti d’opposition d’Aung San Suu Kyi, s’est enfin exprimé après des années de silence sur le sort des Rohingyas. « S’ils ne sont pas acceptés (en tant que citoyens), ils ne peuvent pas juste être envoyés en mer. […] Ce sont des être humains, ils ont des droits » a déclaré Nyan Win, porte parole du parti.

Alors que la Birmanie est confrontée à un nationalisme bouddhiste très fort et que les élections législatives approchent, il s’agit d’un sujet explosif. Comme en témoigne la réaction du gouvernement birman qui récuse toujours toute responsabilité dans le drame des boat people. Le 18 mai, la ministre de l’information a déclaré « comprendre l’inquiétude internationale » mais n’a jamais prononcer le mot « rohingya», terme que les autorités birmanes refusent toujours de reconnaître.

La France doit utiliser son influence diplomatique et économique pour que le gouvernement birman exerce son obligation de protéger son peuple. Sans reconnaissance de la minorité ethnique et de ses droits, l’exode des rohingyas continuera.