Conférence de Presse / Facebook Live : 10 mois après le coup d’Etat militaire, TotalEnergies reste un soutien financier majeur des crimes contre l’humanité commis par la junte

Conférence de Presse / Facebook Live : 10 mois après le coup d’Etat militaire, TotalEnergies reste un soutien financier majeur des crimes contre l’humanité commis par la junte

Mercredi 1er décembre 2021 à 14h

Dans une lettre ouverte à paraître le 1er décembre à l’initiative de la Blood Money Campaign (BMC), plus de 720 organisations de la société civile et syndicats interpellent TotalEnergies sur sa complicité dans les crimes commis par la junte, apportent de nouvelles informations et répondent à la défense inacceptable du statu quo par l’entreprise.

Les paiements mensuels pour le projet gazier Yadana de TotalEnergies sont l’une des principales sources de revenus étrangers de la junte, atteignant plus de 400 millions de dollars US par an. En effectuant et en facilitant les paiements sur des comptes contrôlés par une junte criminelle qui n’est pas reconnue comme le gouvernement du Myanmar, TotalEnergies enfreint les lois du pays, ses contrats et ses obligations en matière de droits humains. Le groupe alimente également un régime criminel désespéré, qui cherche à se maintenir en place par la terreur mais ne contrôle toujours pas le pays.

Alors que le 1er décembre 2021 marquera les 10 mois du coup d’État militaire, le peuple birman sait qu’il est à un moment charnière dans son combat contre la junte et pour la démocratie. La société civile birmane exige des comptes de TotalEnergies et lui demande de suspendre tous les paiements effectués à la junte, dont les crimes constituent des crimes contre l’humanité selon le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar. Un rapport documente également les appels du personnel de Total et de ses sous-traitants pour arrêter les revenus à la junte. La pétition initiée par BMC a déjà recueilli plus de 224 000 signatures. L’appel de la société civile est aussi celui du gouvernement d’union nationale du Myanmar : il est grand temps que TotalEnergies réponde à l’appel du peuple birman.

Le 1er décembre, le 10e Forum annuel des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’Homme reviendra sur les 10 ans des « Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme ». TotalEnergies s’est engagé à respecter ces principes, mais marque cet anniversaire en finançant une armée qui commet des atrocités.

Conférence (en anglais) modérée par Sophie Brondel, coordinatrice Info Birmanie

En présence de:

– Ro Nay San Lwin, de Blood Money Campaign et Free Rohingya Coalition

– Ben Hardman, d’EarthRights International

– Ma Theingi Preuss, du CRPH / NUG Support Group (Allemagne)

Les experts et militants suivants seront présents par visioconférence et resteront disponibles pour répondre aux questions :

– Khin Ohmar, de Progressive Voice

– Debbie Stothard, de ALTSEAN Burma

– Monique Zin, GMSR x BMC

– Ko Ye, Blood Money Campaign

La conférence est retransmise en #live sur Facebook et co-organisée avec la Blood Money Campaign, la Communauté Birmane de France et Global Myanmar Spring Revolution.

Lien vers le live Facebook https://fb.me/e/2W2XyWfuFC

La société civile interpelle Thalès sur son soutien indirect à la junte birmane

La société civile interpelle Thalès sur son soutien indirect à la junte birmane

Paris, le 30 novembre 2021 – Info Birmanie, Justice For Myanmar, Reporters sans frontières (RSF) et Sherpa dénoncent les exportations de technologies militaires effectuées par Thalès à un intermédiaire indien partenaire de la junte birmane, qui auraient été réalisées en violation des mesures restrictives imposées par de lUE après le coup d’État de février 2021 au Myanmar. Les ONG appellent Thalès à cesser ces exportations, et demandent aux autorités françaises de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser ce partenariat et adopter une loi permettant de sanctionner la violation des embargos.

Une enquête de Justice For Myanmar publiée au printemps dernier a révélé que l’un des partenaires de longue date de Thalès, l’entreprise indienne Bharat Electronics Limited (BEL), s’avère être un fournisseur particulièrement proche de la junte birmane, qui lui exporte des technologies militaires. 

Sur la base de ces révélations, Info Birmanie,  RSF et Sherpa ont interpellé Thales dans un courrier daté du 26 novembre 2021. Les ONG ont appelé l’entreprise française à mettre un terme à tout transfert de ses technologies vers la junte au Myanmar, et plus généralement à cesser définitivement sa relation d’affaires avec BEL et avec tout autre partenaire du régime birman.

Les investigations de Justice For Myanmar font état des liens étroits de BEL avec la junte et démontrent la fourniture de matériel à l’armée, ce que BEL confirme dans son rapport annuel 2020-2021.

Selon les informations recueillies, BEL a procédé à au moins sept exportations de radars et équipements au profit de la junte birmane depuis le coup d’État du 1er février 2021 (alors même que des sanctions internationales étaient prises à l’encontre du Myanmar et que les États et les entreprises étaient appelés à prendre toute mesure nécessaire pour ne pas alimenter les atteintes aux droits humains de la junte). BEL lui aurait aussi exporté un système de contrôle d’armes à distance, en partie géré par des dirigeants de la joint venture BTSL (créée entre BEL et Thales Systems Limited).

Au vu de ces informations, il est probable que la technologie partagée par Thalès à BEL, et réexportée par BEL dans ses équipements, soit donc directement transmise à la junte birmane, et potentiellement utilisée par elle pour perpétrer ses atrocités. Ces exportations pourraient alors constituer une violation des mesures restrictives européennes et des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme de l’ONU.

Yadanar Maung de Justice For Myanmar insiste sur le fait que « plus de 1290 personnes ont été tuées par la junte depuis sa tentative de coup d’État, dont des enfants. Frappes aériennes aveugles, destructions de villages, meurtres, viols : l’armée intensifie sa campagne de terreur. Voilà le contexte dans lequel le partenaire de Thalès, Bharat Electronics Ltd, continue de fournir des équipements à la junte. Thalès doit rompre ce partenariat pourmettre fin à tout soutien direct et indirect aux militaires, qui sont des terroristes. »

Pour la coordinatrice d’Info Birmanie, Sophie Brondel « cette affaire confirme le besoin urgent d’un embargo mondial sur les armes en Birmanie, comme y appelaient en février 136 organisations à travers le monde, dont Justice for Myanmar et Info Birmanie. »

« Thalès doit mettre fin à ses relations d’affaires qui profitent à la junte Birmane, déclare pour sa part le responsable juridique de Reporters sans frontières (RSF), Paul Coppin. Le business as usual n’est plus possible avec un pays comme le Myanmar, dont la junte au pouvoir réprime férocement les journalistes et anéantit la société civile. »

Laura Bourgeois, chargée de contentieux et de plaidoyer à Sherpa, estime de son côté que « les entreprises françaises qui fournissent directement ou indirectement des groupes armés et soutiennent ainsi leurs actions ne sont pas suffisamment inquiétées ni responsabilisées : les règles existantes pour les sanctionner sont des règles spéciales trop éparses et restreintes pour être dissuasives. Il est temps que le législateur français crée une infraction réprimant la violation dembargos en tant que telle. »

Les États membres de l’UE, et donc l’État français, ont la responsabilité de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la portée et l’efficacité du droit communautaire, dont les mesures restrictives font partie, et de mettre en place au niveau national des sanctions qui soient effectives, proportionnées et dissuasives.

Les quatre ONG signataires n’excluent pas de donner des suites judiciaires à ces révélations, et de mobiliser la société civile et les autorités compétentes afin qu’elles utilisent au mieux les règles applicables à la violation de mesures restrictives européennes.

Contexte juridique

La Décision du Conseil Européen 2013/184/PESC renouvelée jusqu’au 30 avril 2022 par la décision (PESC) 2021/711 du Conseil du 29 avril 2021 interdit « la vente et la fourniture au Myanmar, ainsi que le transfert et l’exportation à destination de ce pays, par les ressortissants des États membres ou depuis le territoire des États membres (…) des équipements susceptibles d’être utilisés à des fins de répression interne, qu’ils proviennent ou non de leur territoire ».

L’Article 3 bis du règlement 401/2013 du Conseil concernant les mesures restrictives instituées en raison de la situation au Myanmar/en Birmanie tel que modifié par le Règlement 2021/479 du Conseil du 22 mars 2021 interdit « de vendre, de fournir, de transférer ou d’exporter, directement ou indirectement, des biens et technologies à double usage énumérés à l’annexe I du règlement (CE) n° 428/2009 du Conseil (…) à toute entité ou tout organisme au Myanmar ou aux fins d’une utilisation dans ce pays, si ces biens et technologies sont ou peuvent être destinés, entièrement ou en partie, à un usage militaire, à un utilisateur final militaire (…) » étant précisé que « lorsque l’utilisateur final est l’armée du Myanmar, tout bien et toute technologie à double usage qui lui sont fournis sont considérés comme ayant un usage militaire. »

Le Principe n°13 des Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’Homme de l’ONU prévoit que :

« La responsabilité de respecter les droits de lhomme exige des entreprises :

  1. Quelles évitent davoir des incidences négatives sur les droits de lhomme ou dy contribuer par leurs propres activités, et quelles remédient à ces incidences lorsquelles se produisent ;
  2. Quelles sefforcent de prévenir ou datténuer les incidences négatives sur les droits de lhomme qui sont directement liées à leurs activités, produits ou services par leurs relations commerciales, même si elles nont pas contribué à ces incidences »

La Cour de Justice de la Communauté Européenne a jugé en son temps, le 21 sept. 1989, qu’ « il convient de relever que, lorsqu’une réglementation communautaire ne comporte aucune disposition spécifique prévoyant une sanction en cas de violation ou renvoie sur ce point aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, l’article 5 du traité impose aux États membres de prendre toutes mesures propres à garantir la portée et l’efficacité du droit communautaire. » (aff. 68/88, Comm. c/ Grèce, §23).

Pour plus d’informations

Laura Bourgeois – Sherpa : laura.bourgeois@asso-sherpa.org – 07 80 91 65 13

Sophie Brondel – Info Birmanie : sophie@info-birmanie.org  – 07 62 80 61 33

Paul Coppin – Reporters Sans Frontières : paul.coppin@rsf.org

Yadanar Maung – Justice For Myanmar : media@justiceformyanmar.org

Birmanie : la « Dirty List » de l’ONG Burma Campaign UK épingle Total Energies

Birmanie : la « Dirty List » de l’ONG Burma Campaign UK épingle Total Energies

19 Octobre 2021 – Aujourd’hui, l’ONG Burma Campaign UK annonce avoir ajouté 20 entreprises à sa « Dirty List » en raison de leurs liens avec l’armée birmane. Parmi elles, Total Energies et ses partenaires (Chevron et PTTEP) dans le cadre de l’emblématique champ gazier de Yadana.

La « Dirty List » désigne des entreprises qui sont en relation d’affaires avec l’armée bimane ou qui s’engagent dans des activités qui aident à financer celle-ci, fournissent des équipements ou des services à l’armée, ou sont liées à des projets entraînant des violations des droits de l’homme ou la destruction de l’environnement. « Maintenant que les revenus des entreprises d’État sont perçus par l’armée, les relations d’affaires avec les entreprises d’État ont été ajoutées comme critères d’inscription sur la liste » souligne l’ONG. Total Energies, qui fournit des revenus du gaz à l’armée, se voit épinglée pour sa relation avec la Myanmar Oil and Gaz Entreprise (MOGE).

Si Burma Campaign UK a donné aux entreprises la possibilité de répondre et de corriger toute information incorrecte ou obsolète, la réponse de Total Energies ne l’a pas convaincue. Plus de huit mois après le coup d’Etat du 1er février 2021, les revenus du gaz sont toujours l’une des principales sources de financement de la junte militaire. Total Energies – avec le champ gazier de Yadana – demeure mise en cause en tant que source de devises pour un régime militaire criminel. Le groupe n’a pas donné suite à la principale demande portée par la société civile et par le gouvernement d’unité nationale (NUG) en résistance, qui consiste à ce que l’ensemble des paiements à la junte soient suspendus et placés sur un compte bloqué jusqu’au retour d’un gouvernement démocratiquement élu.  

Mark Farmaner, le directeur de Burma Campaign UK, souligne que si « les Birmans font tout ce qu’ils peuvent pour empêcher les revenus d’aller à l’armée, boycottent les entreprises militaires, ne paient pas les factures d’électricité, on ne peut pas en dire autant d’entreprises comme Total », avant d’ajouter que « les entreprises fournissant des services, des équipements et des revenus aux militaires sont complices des violations des droits humains qu’ils commettent ».

Lors de l’inauguration de l’exposition d’artistes birmans « Fighting Fear » qui a eu lieu le 18 septembre à Paris, des personnalités ont interpellé la France et souligné le rôle de Total en Birmanie, appelant à des décisions fortes pour mettre un terme à ce scandale français qui veut qu’une entreprise soit en mesure d’influer sur le positionnement de l’Etat.

En gardant le silence ou en reprenant à son compte l’argumentaire du groupe pour justifier le statu quo, l’Etat français fait la démonstration de sa connivence. En parallèle, il s’oppose avec véhémence à la mise sous sanctions internationales du secteur gazier en Birmanie. Burma Campaign UK note que tout «comme sous la précédente dictature militaire, le lobbying de Total auprès du gouvernement français pour s’opposer aux sanctions sur le pétrole et le gaz est un facteur expliquant que l’Union européenne n’impose pas de sanctions sur ce secteur et permet ainsi à Total de continuer à financer l’armée.»

Au final, ce sont des parlementaires qui font honneur à notre pays. Des sénateurs français ont récemment interpellé Total Energies lors de l’examen de la résolution portant sur la reconnaissance du gouvernement d’unité nationale. Ces voix s’inscrivent résolument dans le prolongement de la tribune de parlementaires parue dans Le Monde le 1er juin, demandant à la France des actions plus fortes et une pression accentuée sur Total Energies. Elles n’ont pas encore été entendues.

La sénatrice du Nord, Michelle Gréaume, rappelle que l’annonce de Total Energies, prise sous la pression des ONG, de suspendre (partiellement) ses versements aux actionnaires (notamment la MOGE) n’est qu’une micro-réponse à un gigantesque problème. Le sénateur de la Haute-Loire, Olivier Cigolotti, souligne que l’apport financier du secteur des hydrocarbures à un pouvoir illégitime est (toujours) un problème. Enfin, Mme Joëlle Garriaud Maylam, sénatrice représentant les Français hors de France, rappelle la demande faite à Total Energies visant à ce que les paiements soient placés sur un compte bloqué jusqu’au retour d’un gouvernement démocratiquement élu. Cette demande est toujours d’actualité, tout comme celle de la mise sous sanctions internationales du secteur gazier.

Nous devons, pour le peuple birman et ses aspirations démocratiques, tarir cette source de revenus qui alimente une junte criminelle. Mais la France s’y oppose. L’inscription de Total Energies sur la « Dirty List » de Burma Campaign UK était attendue : seules des mesures fortes permettront de l’en déloger.