Des Initiatives citoyennes travaillant sur les droits humains, l’éducation ou les questions sociales opéraient déjà en Birmanie lorsque le pays était gouverné par la junte militaire. Un certain nombre d’initiatives sont nées après le cyclone Nargis en 2008 en réponse à l’absence d’aide suffisante du régime après l’impact dévastateur du cyclone. La société civile a connu un nouvel élan après la libération d’Aung San Suu Kyi en novembre 2010 et la mise en place de réformes depuis 2011, qui ont permis une plus grande marge de manœuvre pour les acteurs locaux. Cependant, encore aujourd’hui, les organisations non gouvernementales ne peuvent toujours pas fonctionner tout à fait librement. Il est impossible de travailler ouvertement sur des questions aussi sensibles que les violations des droits de l’homme, en particulier dans les régions ethniques.
A Rangoun on sent aujourd’hui un réel climat d’espoir, les activistes ont une vraie marge de manœuvre pour leurs activités. Pour la société civile locale que cette ouverture récente soit animée par une réelle envie d’intégrer de nouvelles voix au processus démocratique ou non, il en résulte un accès à des débats avant inexistants à l’intérieur du pays et de nouveaux leviers d’action : interpellation publique, collaboration avec les médias, multiplication des échanges avec les groupes exilés,…
La libération des prisonniers politiques, le retour des groupes exilés ainsi que la possibilité pour certains groupes clandestins de s’exprimer plus ouvertement sur la nature de leur travail créent des possibilités d’alliances nouvelles pour les groupes locaux de la société civile birmane.
Par ailleurs, même si les institutions ne fonctionnent pas encore de façon démocratique, leur existence même donne également de nouveaux leviers d’action aux ONG.
En effet, malgré des décennies de régime militaire et de guerre civile, la Birmanie a une société civile dynamique et diversifiée. Il existe une grande variété de groupes informels qui reflètent les diversités ethniques et culturelles du pays. La société civile en Birmanie a considérablement augmenté au cours des deux dernières décennies. A cette étape cruciale, alors que les besoins humanitaires et de développement sont croissants, la société civile birmane doit s’adapter à son nouveau contexte pour qu’elle puisse jouer son rôle de « pont » entre l’Etat et la population
Malgré ce contexte, les acteurs locaux confirment que ces changements ne se sont pas encore traduits dans la vie quotidienne des birmans :
- Les changements proposés par les responsables au niveau national ne sont pas répercutés au niveau des autorités locales, ministères et fonctionnaires. Dans la vie quotidienne et les comportements, il n’y a donc pas eu d’évolution notable.
- Il n’y a pas eu de changement de système : les mêmes lois répressives qui caractérisaient la dictature sont toujours là et les modes de gouvernance demeurent inchangés à l’heure actuelle.
Former la population aux réformes
Il y a une déconnexion immense entre ce qu’il se passe réellement sur le terrain et les politiques.
C’est pourquoi, il est nécessaire de travailler sur « une base communautaire» (grassroot). La société sait que quelque chose est en train de se passer mais ne sait pas comment se comporter. Le bas de la société n’a toujours rien vu de tangible. C’est pourquoi il faut apporter ces connaissances aux populations locales.
Les réformes viennent du haut, il faut que la base s’en saisisse. La société civile doit concrètement pouvoir bénéficier des avancées. Les prochaines élections générales sont en 2015, dans cette optique il est nécessaire de mobiliser le plus vite possible les acteurs de la vie publique birmane.
Les réformes n’ont en effet pas touché les zones rurales. De nombreuses organisations et activistes se penchent sur ce problème et essaient de sensibiliser la population à la démocratie, et de leur parler de leurs droits.
Il y a un immense besoin de connecter la population avec le contexte actuel. Nécessaire « empowerment » de la société civile pour qu’elle puisse participer aux réformes. Sans compréhension et participation active de la population, aucune réforme n’aura d’impact réel.
Les défenseurs des droits de l’homme en Birmanie sont victimes de harcèlement judiciaire.
De nombreuses restrictions affectent toujours les libertés fondamentales et ??les défenseurs des droits de l’homme. S’il faut se réjouir de la libération de nombreux prisonniers politiques depuis mai 2011, une centaine est toujours détenue dans les prisons birmanes et le nombre croissant de détentions arbitraires donne à réfléchir. Depuis janvier 2012, il y a eu au moins 200 arrestations politiquement motivées. Le gouvernement actuel utilise en effet la législation pour persécuter et intimider les personnes qui osent exprimer des opinions contraires aux intérêts de l’État. Les lois répressives sont toujours en place et donnent au gouvernement un cadre juridique lui permettant de procéder à des procéder à des arrestations arbitraires et de mettre sous silence les voix dissidentes.
Ces derniers mois, de nombreux activistes ont été arrêtés et poursuivis en vertu de la loi de 2011 sur les rassemblements pacifiques et les défilés, notamment dans le cadre de leur soutien aux populations locales contre le développement de projets industriels, d’infrastructures ou l’utilisation des ressources naturelles (Shwe Gas, mine de cuivre de Monywa..)