CP 28 janvier 2021 – Le commandant en chef de l’armée birmane Min Aung Hlaing vient d’évoquer la révocation de la Constitution de 2008 comme une possibilité dans un discours prononcé mercredi à l’attention d’officiers supérieurs.
La veille, le porte-parole de l’armée dénonçait de nouveau des irrégularités lors des élections législatives du 8 novembre massivement remportées par la LND, n’excluant pas la possibilité d’un coup d’État si les vérifications demandées par l’armée n’étaient pas effectuées. Le porte-parole de l’armée a aussi indiqué que l’absence de prise en compte des allégations de fraude avancées par l’armée entraînerait une « crise politique ». Nous y sommes. Dernier grief en date ? Le refus du parlement de tenir une session spéciale à ce sujet, au motif que la commission électorale est seule compétente en matière de contentieux électoral.
L’armée veut voir dans ce refus une violation de la Constitution. Face à la « non prise en compte » de ses demandes, elle se pose en garante de la Constitution et se dit prête à la révoquer… si elle n’est pas respectée. Des voix se lèvent pour souligner qu’un coup d’Etat serait contraire à la Constitution, mais Min Aung Hlaing balaie cet argument d’un revers de main et va jusqu’à rappeler les précédents funestes qu’a connu la Birmanie.
Alors que la Constitution de 2008 garantit des pouvoirs exorbitants à l’armée, celle-ci entend-elle seulement rappeler son rôle politique de premier plan et montrer sa force de nuisance au nouveau parlement qui doit siéger la semaine prochaine, puis au gouvernement à venir ? Entre ceux qui balaient toute menace et ceux qui y voient l’annonce d’une « action militaire » dont la forme resterait à définir, il est en tout cas manifeste que le climat politique est dégradé.
Depuis novembre, l’armée et ses affiliés continuent de contester le résultat des élections législatives, un scrutin qui a par ailleurs fait l’objet de nombreuses contestations de la part de la société civile pour des considérations liées aux droits de l’Homme.
Les élus du nouveau parlement convoqué le 1er février s’apprêtent donc à siéger dans une ambiance bien éloignée de l’euphorie suscitée par la victoire de la LND en 2015. Face à un bilan très mitigé et à l’ampleur de la tâche à accomplir, ils restent confrontés à une armée qui n’en finit pas de plomber toute « transition démocratique ». Les échanges avec les 33 élus de l’USDP – le parti affilié à l’armée – et les militaires qui occupent automatiquement 25 % des sièges au parlement s’annoncent tendus, avec les échéances de la reconduction d’Aung San Suu Kyi en tant que conseillère spéciale, l’élection du président et des vice-présidents et la nomination d’un nouveau gouvernement en mars.