Le mercredi 24 octobre 2018, Marzuki Darusman, président de la Mission d’établissement des faits de l’ONU sur la Birmanie, a présenté ses conclusions au Conseil de sécurité de l’ONU. La veille, le rapport des enquêteurs de l’ONU avait été présenté à l’Assemblée générale.
Cette présentation devant le Conseil a été faite à la demande de neuf Etats membres du Conseil de sécurité, parmi lesquels la France. Cette initiative ne peut qu’être saluée. Sans surprise, la Chine et la Russie se sont opposées à la tenue de cette réunion, mais n’ont pu l’empêcher, en application des règles de fonctionnement du Conseil.
En marge de cette réunion, Marzuki Darusman a déclaré que le génocide des Rohingya en Birmanie se poursuivait, en précisant qu’à l’exception des tueries, toutes les autres caractéristiques de ce crime de masse étaient toujours présentes. Devant le Conseil de sécurité, il a en particulier appelé à ce que ce dernier saisisse la Cour pénale internationale ou crée un tribunal ad hoc. Il a rappelé que la mise en cause des principaux responsables des crimes les plus graves en droit international, nommés par les enquêteurs de l’ONU, est indispensable à tout processus de réconciliation nationale. Et qu’il n’existe aujourd’hui aucune perspective de justice pour les victimes en Birmanie. Des Rohingya continuent de fuir la Birmanie par centaines chaque mois et aucune mesure significative en terme de justice et de droits n’a été adoptée par les autorités birmanes, qui jusqu’à présent, ne reconnaissent ni l’existence, ni l’ampleur des crimes perpétrés.
La présentation de ce rapport devant le Conseil de sécurité marque un tournant pour la communauté internationale. Il en va de la raison d’être de cette institution. Sur la base des éléments portés à sa connaissance, le Conseil de sécurité de l’ONU doit adopter des mesures significatives, en particulier en matière de justice. Pour espérer mettre un terme aux cycles de violence récurrents que connaît la Birmanie, dans l’état d’Arakan, mais aussi dans d’autres états, en particulier du nord et de l’est, et pour ne pas priver la Charte des Nations Unies de tout sens, l’ONU doit agir. C’est précisément face à de telles situations qu’autorité a été donnée au Conseil de sécurité pour agir.
Il appartient à la France, aux côtés de ses homologues, d’appuyer officiellement les recommandations portées par Marzuki Darusman devant le Conseil de sécurité :
- saisine de la Cour pénale internationale ou création d’un tribunal ad hoc
- adoption de sanctions individuelles ciblées contre les hauts-gradés de l’armée désignés par le rapport des enquêteurs de l’ONU, en particulier le commandant en chef de l’armée, le général Min Aung Hlaing
- embargo sur les armes
- interdiction de toute transaction avec les entreprises affiliées à l’armée birmane