Découvrez toutes les idées reçues sur l’investissement en Birmanie !
En Birmanie, l’électricité alimente moins d’un tiers du pays. En 2009, selon l’Energy Information Administration (US), le pays utilisait à peine 5% de l’énergie consommée par la Thaïlande. Seule la capitale économique, Rangoun, et la seconde ville de Birmanie, Mandalay, bénéficiaient de l’électricité, pendant que le reste du pays était « plongé dans le noir ».
Aujourd’hui, encore 74% de la population a un accès limité à l’électricité et seulement 16% des zones rurales sont électrifiées alors que 70 % de la population est rurale[1].
Un rapport publié par le World Economic Forum (WEF) rappelle que la consommation d’électricité par habitant est l’une des plus faibles d’Asie alors que le pays dispose d’un potentiel énergétique très important (gisements de ressources naturelles nombreux et exploitation prometteuse d’énergies renouvelables comme le solaire etc.). Il conclut que sans électricité ni système énergétique durable et fiable, le développement économique ne saura s’accélérer.
Ces dernières années, des projets d’extraction de gaz naturel et de barrages hydrauliques se sont multipliés dans le pays, mais plutôt que de profiter aux birmans, l’énergie produite est vendue aux pays voisins.
Les projets économiques se font finalement majoritairement au détriment des communautés locales puisqu’ils sont responsables de déplacements massifs de populations et de dommages irréversibles sur l’environnement menaçant les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire de millions de personnes.
La militarisation accrue pour sécuriser les projets est également directement associée à l’augmentation des droits de l’homme comme les extorsions, les viols et violences sexuelles, le travail forcé et la confiscation des terres.
Plus de vingt projets de barrages hydroélectriques de grande envergure sont en cours de construction à travers le pays, et une quarantaine de blocs pétroliers et gaziers sont en phase d’exploration. Les communautés locales se mobilisent pour que l’utilisation des ressources naturelles de leur région se fasse avec leur consultation et en leur faveur, mais leur opinion n’est toujours pas entendue et de nouvelles licences seront attribuées prochainement à de nouveaux investisseurs étrangers sans exigences environnementales ni sociales, ni répartition équitable des richesses.
Exemple concret : Le projet gazier « Shwe Gas »,
Le projet gazier « Shwe Gas », a été mis partiellement en service en juillet 2013. Il comprend aujourd’hui un port en eau profonde et 800 km de pipelines qui traversent la Birmanie jusqu’en Chine afin de couvrir ses besoins énergétiques : un gazoduc et un oléoduc acheminent du gaz naturel pompé à l’ouest de la Birmanie, et du pétrole brut venant du Moyen-Orient et de l’Afrique, à destination de la Province du Yunnan.
Le projet s’appuie sur un système de répartition des bénéfices totalement injuste, qui met de côté les communautés locales et qui est à l’origine d’impacts sociaux, économiques et environnementaux importants :
- Le projet prive le pays de l’énergie dont la Birmanie aurait besoin pour se développer et réduit les chances d’électrification et de création d’emploi en Birmanie. Les prix de l’énergie flambent et les populations n’ont majoritairement pas accès à l’électricité. Le projet va produire des trillions de mètres cubes de gaz qui pourraient être utilisés pour accélérer le développement économique et social de la Birmanie. Toutefois, les ressources naturelles locales seront acheminées en Chine et la construction des pipelines a dégradé les conditions de vie des communautés.
- Des milliers d’agriculteurs et de pêcheurs ont vu leur terre confisquées ou devenir inutilisables à cause des dommages environnementaux provoqués par le projet: les travaux et les aménagements réalisés bloquent les routes empruntées par les populations locales, les zones de pêches ne sont plus accessibles ou trop polluées pour être utilisées, les entreprises jettent leurs déchets dans les champs, les bulldozers détruisent les terrains etc. Le mode de vie des communautés a donc été totalement perturbé et leur condition de vie profondément dégradée.
- La perte de leur moyen de subsistance conduit les populations à travailler temporairement pour le projet Shwe gas, mais le projet emploie des hommes, des femmes et des enfants dans des conditions effroyables. Les salaires perçus sont dérisoires. Le montant annoncé est 6,25 dollars US par jour mais les villageois ne reçoivent que 2 dollars et s’ils se plaignent, ils sont renvoyés.
- Les femmes sont discriminées – salaires et compensations encore plus faibles – et sont les premières victimes de l’industrie du sexe qui se développe autour du projet.
- Le projet manque totalement de transparence : les populations ne sont pas informés, y compris lorsqu’il s’agit de leur terre, de leurs compensations et des impacts sur leur environnement. Le manque de consultation des communautés locales a pour conséquences la mise en place de projets philanthropiques des entreprises qui ne répondent pas aux besoins des populations.
- Des défauts dans les pipelines provoquent des fuites de gaz, des explosions et des incendies qui effraient les populations et dégradent leur environnement. Les trous des pipelines sont réparés avec des pièces de caoutchouc, comme s’il s’agissait de pneus.
- Le harcèlement et les intimidations des populations sont monnaie courante, notamment lorsqu’elles montrent leur désaccord. Le 26 septembre 2013, dix activistes ont encore été condamnés à 3 trois mois de prison pour avoir protesté contre le projet.
- Le renforcement de la présence militaire accentue la corruption locale : les investisseurs s’accordent avec l’armée pour confisquer les terres des résidents. 2000 villageois Palaung ont déjà été déplacés sans compensation adéquate.
- Le projet alimente les tensions et les conflits armés dans le pays car les pipelines traversent les régions particulièrement sensibles (notamment l’État Arakan et Shan). Le renforcement de la présence militaire, l’exploitation intensive des ressources naturelles, l’accaparement des terres et la destruction de l’environnement dans ces régions, exacerbent les conflits.
Lorsque la construction du projet a commencé en 2009, les populations espéraient, comme le promettaient les entreprises, qu’il y aurait un impact positif sur l’emploi, les infrastructures, l’éducation, la santé etc. Ces espoirs ont vite été déçus.
Pour en savoir plus :
– Articles sur les projets d’investissements en cours (lire)
– Vidéo du Shwe Gas Movment – « The Source of Trouble » 2013
– Rapport du Business & Human Rights Resource Centre : “Business & human rights in Myanmar: A round-up of recent developments” – Août 2013
– Rapport du Shwe Gas Movment “Drawing the line: the case against China’s Shwe
gas project, for better extractive industries in Burma” – septembre 2013
Aidez-nous à diffuser la campagne en partageant les idées reçues sur les réseaux sociaux!
[1] http://www.renewableenergyworld.com/rea/news/article/2013/06/renewable-energy-in-myanmar-not-just-clean-its-necessary