CP 12 novembre 2019 – La Gambie vient de renvoyer l’Etat birman devant la Cour Internationale de Justice (CIJ) pour le génocide des Rohingya. Cette initiative, lancée le 11 novembre et portée par l’Organisation de la Coopération Islamique, était attendue depuis des mois. Cette procédure vise à mettre en cause la responsabilité de la Birmanie en tant qu’Etat pour avoir échoué à prévenir et à réprimer le génocide des Rohingya au titre de la Convention de 1948 sur la prévention et la répression de ce crime.
La CIJ, basée à La Haye, est une juridiction qui règle les différends entre Etats. Elle a eu, par le passé, à connaître d’une procédure initiée par la Bosnie-Herzégovine à l’encontre de la Serbie au titre la Convention de 1948. En fonction des suites qui seront données à la procédure, la CIJ pourrait enjoindre à la Birmanie d’adopter des mesures provisoires pour faire cesser les violations à ses obligations, dont les Rohinyga continuent d’être les victimes. La Gambie le lui demande d’urgence.
Le 16 septembre, les enquêteurs de l’ONU ont caractérisé l’intention génocidaire de l’Etat Birman au titre de la Convention de 1948 dans leur dernier rapport présenté devant le Conseil des droits de l’Homme. Ils ont aussi alerté la communauté internationale sur le fait que les Rohingya demeurant en Birmanie y restent exposés à la menace d’un génocide. Il est plus que temps d’agir et de faire rendre des comptes à la Birmanie, dans le cadre d’une procédure qui ne se satisfera pas de son déni caractérisé.
Le Ministre de la Justice de Gambie, Aboubacar Tambadou, rappelle que « le génocide concerne l’humanité toute entière » et que cette procédure devant la CIJ vise à mettre en exergue « la responsabilité de la Birmanie vis-à-vis de son propre peuple ». Ancien procureur au Tribunal Pénal International Pour le Rwanda (TPIR), il déplore la même faillite de la communauté internationale face au génocide qui se préparait au Rwanda et face au génocide des Rohingya, en germe depuis des années.
Comme le souligne l’ONG Fortify Rights dans un communiqué du 11 novembre, les Etats membres de l’ONU doivent désormais apporter leur soutien à l’initiative gambienne. Son directeur exécutif, Matthew Smith, note que l’initiative de la Gambie est remarquable et que ce pays n’aurait pas dû se retrouver seul à agir. Car tous les Etats membres de l’ONU ont l’obligation, par application du droit international coutumier, de prévenir et de réprimer le crime de génocide. Ils devraient donc apporter leur soutien à cette procédure devant la CIJ. Les Etats qui ont ratifié la Convention de 1948 peuvent par ailleurs intervenir à la procédure en soumettant des interprétations de ce texte s’agissant de la situation des Rohingya.
Soulignons que le Canada – qui s’honore à appeler publiquement le Conseil de sécurité de l’ONU à saisir la Cour Pénale Internationale pour faire juger pénalement les principaux responsables des crimes en question – vient de saluer l’initiative gambienne et de lui signifier son entier soutien.
La France – qui s’était illustrée en 2017 par la voix de son Président qualifiant de «génocide » le nettoyage ethnique subi par les Rohingya – devrait apporter un soutien public à l’initiative gambienne et l’appuyer par tous les moyens possibles (diplomatiques, matériels et juridiques). Il en va de la défense des valeurs portées par cette initiative.
Contact : Sophie Brondel 07 62 80 61 33 sophie@info-birmanie.org