Dawei est un projet industriel gigantesque dans le sud de la Birmanie qui implique le déplacement de 30 000 personnes.
UN COMPLEXE INDUSTRIEL GIGANTESQUE
En 2008 la Birmanie et la Thaïlande ont signé un accord pour développer la zone économique spéciale de Dawei. Ce projet stratégique de développement industriel a été conçu pour être l’un des plus gros d’Asie du Sud-Est. Il prévoit la construction d’un port en eau profonde, adossé d’un complexe industriel de de 250 kilomètres carrés sur la côte de la mer Andaman, au sud de la Birmanie.
Développé principalement par le géant thaïlandais Italian-Thai Development, ce complexe tentaculaire qui s’élève à 50 milliards de dollars comprendra entre autre une aciérie, une usine pétrochimique, une raffinerie pétrolière et un chantier naval. Il sera également relié à Bangkok par autoroute. La Thaïlande s’étant engagée à fournir de l’aide en matière de sécurité, d’infrastructure et de logistique.s
Pour le gouvernement birman ce projet est crucial, en ce qu’il permettrait d’attirer des investisseurs étrangers, alors qu’il offrirait à la Thaïlande un accès direct vers l’Océan indien et les marchés économiques occidentaux.
Pour les populations locales, Dawei symbolise au contraire le début d’un long cauchemar. Il implique en effet le déplacement de plusieurs dizaines de milliers de résidents, la perte de leur moyens de subsistance, de gros dégâts environnementaux et la mise en péril de l’héritage culturel des communautés locales.
UN PROJET INÉQUITABLE
Début 2012, le mécontentement de la population avait conduit le gouvernement à abandonner le projet de centrale à charbon de 4 000 mégawatts qui aurait été responsable de dommages environnementaux et sanitaires colossaux sur le site. Mais aujourd’hui, malgré les protestations, une quinzaine de village vont être détruits et 20 000 résidents doivent être expulsés sans qu’ils n’aient été ni consultés, ni entendus.
Les compensations prévues ne compensent ni la perte de leur maison, ni de leurs moyens de subsistance, ni leur préjudice moral. Enfin, personne ne sait quand elles seront versées. Certains habitants ayant déjà été expulsés attendent toujours les sommes promises. En outre, le projet de Dawei a fait exploser le prix de la terre et créer des divisions au sein des communautés.
De son côté, le gouvernement thaïlandais insiste pour que le projet soit réalisé comme prévu et les promoteurs immobiliers profite des carences légales pour subtiliser les terres des populations locales. Une villageoise dénonce les menaces dont les populations sont victimes : « ils ont dit que si on ne quittait pas nos terres, ils les détruiraient tout de même et qu’on aurait de gros problèmes ».[1]
FAUTE D’ÊTRE CONSULTÉES, LES COMMUNAUTÉS ESSAIENT DE S’ORGANISER
L’Union des femmes de la région de Dawei (Tavoyan Women’s Union (TWU), a réalisé une vidéo dénonçant les abus liés à la construction du complexe de Dawei et appelle à ce que le projet soit suspendu.
L’association est notamment préoccupée par le sort des 12 000 habitants des 6 villages qui vont être expulsés très prochainement pour la mise en œuvre de la première phase du projet. Au total, 30 000 personnes appartenant à 19 villages de la région de Nebule, devront quitter leur terrain.
La population Tavoyan (de la région de Dawei), impuissante sous la dictature, s’organise aujourd’hui pour protester. Les villageois refusent de quitter leur maison et d’abandonner les terres agricoles sur lesquelles ils ont fait pousser depuis toujours des plantations de noix de cajou, de coco et de bétel, de caoutchouc ainsi que des fruits, des légumes etc. Ils ont également décidé de refuser les compensations promises en échanges de leur terre et d’empêcher les inspecteurs de mesurer leurs terrains.
« Dans le village de Mudu, on peut vivre des produits de la forêt et des récoltes de nos plantations. On ne peut pas quitter nos plantations et partir. Même si on ne peut pas avoir de revenus grâce à d’autres activités, en une journée on peut toujours gagner au moins 5000 kyats en vendant des feuilles de bétel et c’est suffisant pour nourrir ma famille. Après qu’on soit parti, qu’est-ce qu’on va manger ? L’argent qu’ils veulent nous donner ne sera pas suffisant. Ici toute ma vie, j’ai toujours eu de quoi manger, c’est pour ça que je ne veux pas partir. » [2]
En attendant, les véhicules de construction ont commencé les travaux sans en informer les communautés. Sur leur passage, les bulldozers détruisent les routes locales, bloquant les déplacements des villageois ainsi que ceux des enfants allant à l’école.
Alors que le projet de Dawei brasse des milliards de dollars, les plaintes des villageois qui demandent la réparation des dégâts, tombent dans l’oreille de sourds, ils sont donc contraints de réparer eux même les routes, avec le peu de matériel dont ils disposent.
Parallèlement, de nouvelles routes construites pour le projet, bloquent les voies fluviales existantes et sont responsables de l’inondation et de la destruction des rizières.
TWU a réalisé une vidéo sur les impacts sociaux et environnementaux massifs du projet.[3] L’association appelle à la suspension immédiate du projet ainsi qu’à l’application du consentement libre, préalable et éclairé des populations locales pour tout projet futur.[4]
“Nous ne sommes pas contre le développement” a déclaré Su Su Swe, le secrétaire général de TWU, “mais le peuple de la région de Dawei devrait pouvoir prendre les décisions qui concerne son développement et ses ressources naturelles ».
Ce projet n’est pas un cas isolé, plus de vingt projets de barrages hydroélectriques de grande envergure sont en cours de construction à travers le pays, et une quarantaine de blocs pétroliers et gaziers sont en phase d’exploration. Info Birmanie appelle les entreprises à respecter le principe de « consentement libre, préalable et éclairé » (CLIP) des communautés, avant tous projet d’investissement en Birmanie.
Pour en savoir plus :
– Sur le consentement libre, préalable et éclairé (CLIP) : lire l’article
– Sur la vidéo de TWU :
English Version: http://www.youtube.com/watch?v=01LFlWAxV80&feature=youtu.be OU http://goo.gl/buQGBZ
Burmese Version: http://www.youtube.com/watch?v=zwhZa9kixCg (or) http://goo.gl/dqB5c5
Contacts:
Su Su Swe
General Secretary
susudawei@gmail.com
Tel: 09 4250 27681
Lwin Lwin Hlain
Joint General Secretary
lwinlwinhlain2013@gmail.com